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Sacs jaunes
Le 16 mars 78, l'Amoco-Cadiz s'échoue sur les rochers de Portsall avec 220 000 tonnes de pétrole dans les soutes. La marée noire du siècle peut commencer. Pour les Bretons, ce n'est malheureusement ni la première couche, ni la dernière. Avant, il y avait eu le Torrey Canyon, l'Olympic Bravery, Le Boehlen. Après, il y aura le Gino, le Tanio, l'Erika.
J'ai écrit ce texte en 2003, alors qu'une autre poubelle flottante venait de se fracasser sur la côte bretonne ... Les relents, puanteurs, de l'Amoco Cadiz (17 mars 1978) étaient encore dans toutes les têtes. Commémoration ces jours-ci des 40 ans de cette catastrophe.
Opération « Sacs jaunes »
Depuis déjà (ou seulement ?) trois heures, ils se déplacent, mécaniquement, conditionnés par leurs emballages… Ils (ou elles ?) disparaissent dans leurs grands sacs-combinaisons, qui ont été blancs… Ces sortes de babygros, gros comme grotesques, bavent à présent de coulures brunes, ou beiges, ou noires, ou écrues, selon la teneur du poison.
D’eux, on n’aperçoit de la dune que trois teintes, qui ne se confondront jamais avec celles de la mer toute proche : brun, blanc sale, et … jaune.
On leur a donné des sacs jaunes. Jaunes comme ceux des campings, là où on a placé de beaux bacs en bois, estampillés « Vacances Propres » !
Chacun de ces zombies est un volontaire désespéré, qui n’a même plus la force de hurler sa colère : ça, c’était bon il y a longtemps…
Le petit vieux, couché, acharné, têtu, charge interminablement son sac jaune de mazout gluant et puant, déclarant tout seul, de temps à autre : « Déjà, en 78, l’Amoco… » Et il chantonne, il est fou…
http://www.letelegramme.fr/ig/dossiers/amoco/amoco-cadiz-la-plus-grande-maree-noire-de-l-histoire-30-12-2008-184811.php
Loïc, juillet 2003.
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Commentaires
Je me souviens de tous ces tristes événements, nous, impuissants ne pouvions que joindre nos pleurs et nos cris à ceux de ce peuple Breton sali par la merde des faiseurs de pognon qui n'ont jamais dédommager les communes à hauteur du préjudice qu'elles leur ont fait subir, même encore maintenant j'ai le cœur qui saigne chaque fois que je pense à ces tragédies
Amicalement
Claude
Je n'ai pas les mêmes souvenirs mais rien que de lire ton texte, cela me fait frémir. Non les côtes ne sont pas à l'abri d'une autre catastrophe. Mais l'Homme fâché veut-il pour autant changer son mode de consommation et donc la manière dont il s'approvisionne pour vivre au quotidien?
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Et combien d'autres depuis?!
Je m'en souviens très bien, on suivait à la télé, les images révoltantes et le désarroi des courageux bretons. On avait l'impression que jamais
on arriverait à se débarrasser de cette saloperie et que la Bretagne serait à jamais souillée. Un choc terrible.
Le pire c'est que l'on est pas à l'abri d'une nouvelle catastrophe, tu fais bien d'en parler, merci Loïc.
J'ai gardé un moment dans ma cave, "en souvenir", mes bottes souillées à jamais ...
Les Bretons (et d'autres) ont été blessés et le sont restés depuis : une déchirure, des manifestations. Mais contre des hommes, jamais contre la mer, car nous savons que nous serons toujours dépassés.
"La mer n'est pas méchante" Jacqueline Tabarly