Les « penn sardin », chant des sardinières de Douarnenez.
Toujours sur les croqueurs de mots : Cette fois nous choisissons un poème ou une chanson sur le thème de la mer, et nous disons pourquoi nous l’aimons.
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La mer est (en cette période de vacances, particulièrement) synonyme de liberté, de temps libre… Mais encore aujourd’hui, du moins en Bretagne, elle est aussi (surtout ?) la mère emblématique de ces métiers spécifiques, de ces emplois directs ou indirects, du marin-pêcheur au mareyeur et au vendeur des halles, du matelot mécanicien au fourrier, au bosco, au pilote de l’Aéronavale… Une liste infinie.
Dès que les luttes sociales dans le milieu maritime sont évoquées, j’ai en tête la « grande grève » de 1924 après celle de 1905 des ouvrières d’usine (penn sardin) de Douarnenez, la première commune française – tout de même – à avoir par la suite, élu un maire communiste. Tout est expliqué ici. Claude Michel, avec sa gouaille et sa voix un peu éraillée, a composé cette chanson pour revendiquer haut et fort, fièrement surtout, son appartenance à ce milieu : militante sociale, et militante féministe. « Ce que je déteste par-dessus tout ? les machos ! » (À 80 ans, elle en a certainement connu plus d’un, dans sa jeunesse). Accordéon diatonique, harmonica, nous voici dans les chants de marins ? Non, pas tout à fait, car ici ce n’est pas le folklore des chants de travail (à hisser, à tirer, à ramer…). Nous sommes dans la revendication, la lutte sociale que n’ont pas forcément menée tous ces travailleurs de la mer, par empêchement, par ignorance, par manque de force… Très souvent, les marins au long cours emportaient pour leur voyage un harmonica, ou pour les moins pauvres, un diato. On répétait alors des chants connus sur tous les ponts, et souvent internationaux. Ou alors, certains créaient de nouvelles chansons sur une musique déjà existante, lorsqu’une occasion se présentait : événement particulier à bord, bagarre, escale mouvementée...
À défaut d’être en tous points le reflet du travail de la vie à bord ou dans l’usine, ces chants respirent l’ambiance de l’époque, l’état d’esprit, parfois la joie d’être ensemble, mais la souffrance surtout.Une chanson écrite par Claude Michel et composée par Jean-Pierre Dovilliers, parue sur l'album "Toi mon accordéon" et qui raconte la célèbre grève des sardinières de l'usine Carnaud en 1924, symbole de la prise d'autonomie et de l'engagement des femmes, symbole de l'histoire du Finistère (Article 1 - Article 2).Il fait encore nuit, elles sortent et frissonnent, Le bruit de leurs pas dans la rue résonne.Refrain : Écoutez l' bruit d' leurs sabots Voilà les ouvrières d'usine, Écoutez l' bruit d' leurs sabots Voilà qu'arrivent les Penn Sardin.À dix ou douze ans, sont encore gaminesMais déjà pourtant elles entrent à l'usine.RefrainDu matin au soir nettoient les sardinesEt puis les font frire dans de grandes bassines.RefrainTant qu'il y a du poisson, il faut bien s'y faireIl faut travailler, il n'y a pas d'horaires.RefrainÀ bout de fatigue, pour n' pas s'endormirElles chantent en chœur, il faut bien tenir.RefrainMalgré leur travail, n'ont guère de salaireEt bien trop souvent vivent dans la misère.RefrainUn jour toutes ensemble ces femmes se lèventÀ plusieurs milliers se mettent en grève.Refrain : Écoutez claquer leurs sabots Écoutez gronder leur colère, Écoutez claquer leurs sabots C'est la grève des sardinières.Après six semaines toutes les sardinièresOnt gagné respect et meilleur salaire.RefrainDans la ville rouge, on est solidaireEt de leur victoire les femmes sont fières.RefrainÀ Douarnenez et depuis ce tempsRien ne sera plus jamais comme avant.Refrain Ecoutez l'bruit d'leurs sabots C'en est fini de leur colère, Ecoutez l'bruit d'leurs sabots C'est la victoire des sardinières.
Loïc