• Deux portraits.

    Un vieil homme parle :
    "Tu sais, Dali, j'ai vu ton autoportrait chez toi, je l'ai vu, très longtemps, bien trop longtemps. Le maître riait de mes yeux étonnés, exorbités même, et s'esclaffait devant mes incompréhensions. Un jour, il me lâcha : "Normal, il ne peut pas apprécier, le nègre. »
    Je ne savais pas si c'était beau, on ne m'a jamais appris ce que signifie ce mot. Mais j'avais peur. Peur de ce visage éclaté, écartelé, déchiré comme l'âme de Dali, une expression à la fois clownesque et menaçante, une manifestation de haine et de violence.
    Cela m'a pris un long temps pour découvrir la langue qui coulait lentement, comme du miel et se répandait au sol, glissait tel un serpent visqueux.
    Depuis ce temps, j'ai pris à mon compte l'expression « soft self portrait ». Mais je connais, moi, mon visage. Et je ne le jette pas en peinture et en pâture en pleurant. Ils en seraient si fiers, les riches blancs. Avilis, diminués, niés,  ils nous ont tout fait, les riches blancs.

    Je n'ai plus de voix : mes mains parlent bien mieux que moi. »

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  • Liste de mots à placer dans un texte : coloré – animal – nature – campagne – surprise – jambon – innocence – basse-cour – diversité – bestiaire.

    Une surprise aujourd'hui : Françoise, de nature innocente, et au vocabulaire coloré, s'attelle à nous faire apprécier la diversité du bestiaire offert à notre vue.

    Des animaux ? Oui, bien sûr ! Mais pas de pré, mais des vaches. Pas de basse-cour, mais des coqs et des poules. Toute la campagne est réunie ici, source insatiable d'inspiration, mais Françoise a oublié le principal l'inévitable en pays fouesnantais : le coup d'cidre et le sandwich jambon-beurre.

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  • Un gars d'laville

    Un gars d'la ville, ouais, c'est bien ça. C'est forcément la raison : Je suis traumatisé. Le mot est trop fort ? Non ! Gars de la ville, je suis passé d'un coup d'une ville de 220,000 habitants à un bourg de 2.000 villageois.

    Tizef, Brestois, Bressoâ avec l'accent … Oui, et je ne fais rien pour me soigner. Je m'y complais, même.

    Je suis traumatisé par les vaches, je ne parviens pas à m'y habituer. Vachophobie. Vaccophobie ?

    Vacuité … Dans mon quotidien, je n'ai l'occasion d'être en présence de vaches – et la réciproque est vraie – qu'en période de vacances. Et encore, durant les vacances j'aime beaucoup visiter … les villes.

    Alors … Prime Holstein, Pie noire, Salers, et autres, pas question de les approcher : Panique ! Si je tente de m'approcher, de caresser le museau pour en amadouer une, la grosse tête se tourne et les gros yeux globuleux me fixent, interrogateurs, semblant ne pas me voir.

    J'évite de passer derrière l'animal, bien sûr, car elle me gratifierait, pour ma peine, d'une puissante ruade. Je serais projeté sur sa voisine, le choc ferait tourner leur lait.

    Voilà pourquoi j'ai un problème, je crois que … j'adore le lait.

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  • Rita
    Ma pauvre,
    Es-tu tarie ?, 
    Tes trop belles couleurs
    sont des pièges bien attirants,
    et tout mon être s'y perd ...
    Comment une pintade pourrait-elle
    Me faire taire et trembler 
    sans faim, ni appétit ?
    Tu y parviens, 
    sacrée coquine, 
    Rita 

    ...................................................................................
    Le coq et le renard.

    Ne bouge plus, sieur Coq,
    Te voir me trouble et m'éblouit,
    D'habitude pourtant je ne pense à toi que cuit.

    Holà renard, pas si vite, bientôt tu me parlerais
    De fromage, mais celle-là je la connais,
    Et ne tomberai pas dans ton piège.

    Mais Sieur Coq je ne te veux que du bien, 
    je prépare mes pinceaux pour te croquer, tu es si beau.
    Tes bajoues rutilantes, ta queue royale et imposante ... :
    Je n'y tiens plus.

    Arrête, la bête, assez le bavard.
    Regarde moi bien si tu veux bien, 
    tu verras mes pattes enfoncées dans la boue, c'est, dit-on, la meilleure position pour la méditation.

    Méditation ? s'écrie compère le renard, et, bousculant Chantecler, il plonge dans la flaque qui l'engloutit, victime de son poids.

    Moralité : Un jour gagnant, un jour perdant, la chance ne sourit pas toujours aux mêmes. Aussi pensons à notre sort afin de ne point nous piéger nous-mêmes.

    Loïc de La Fontaine

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  •  

    Ma madeleine à la crème.

     

    Nous passons, lors d'une promenade familiale, devant "chez Touz", nous reniflons la bonne odeur du chocolat. Chez Touz, c'est la grande fabrique de petits gâteaux et de pâtisseries de toutes sortes. Mon frère, âgé de sept ans de moins que moi, est installé dans son landau. Pour Noël, nos parents nous offrent de nous asseoir pour déguster un chocolat, et j'admire la vitrine décorée d'un magnifique circuit de train électrique. Plus loin, près des attirantes œuvres de diverses reproductions « en chocolat » (c'est magique!), un pivert plonge le bec dans un verre à long cou, puis remonte, tout seul, sans moteur. Pour l'éternité. À l'entrée, un Père Noël propose la photo traditionnelle en sa compagnie…

    On cuit du chocolat, aujourd'hui. Et j'ai réussi à trouver et recopier, dans un almanach Vermot, la recette de la crème au chocolat. J'ai simplifié à ma façon, pour avoir moins de vaisselle à faire, et la voici :

    Je chauffe un litre de lait dans lequel je verse trois ou quatre grandes cuillerées de chocolat Poulain (publicité gratuite). Je délaye dans un bol une belle cuillerée de Maïzena dans du lait, et, quand le chocolat bout dans la casserole, j'y verse cette poudre magique, qui cuit en quelques secondes. Je verse la crème dans des ramequins, c'est fini ! Je place à refroidir, mais le meilleur est lorsque je gratte le fond de la casserole : ce chocolat brûlant est un délice…

    Actuellement, je fabrique encore de temps en temps cette mixture, que je déguste devant la télé, et tout me revient : papa, dans sa lourde "canadienne", le landau aux toutes petites roues, le Père Noël, les dames chics qui font emballer de succulents gâteaux, et surtout l'extrême plaisir de se trouver là, en famille, uniques et isolés dans la foule des passants de la rue Jean-Jaurès. C'est sans nul doute ce plaisir que je retrouve lorsque je déclare goulûment : « Je vais faire ma crème ! »

     

    Loïc, mai 2005 (et toujours aussi lichou)

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  • Je rêve un peu, ces derniers jours, devant le triste spectacle du Monde ... et je me retrouve en 1971, à 19 ans, plein d'enthousiasme et de jus, plein d'espoir à un moment où certains pensaient que "ça ne pourrait pas être pire", et où d'autres s'efforçaient de croire aux possibilités de changer le Monde et surtout les hommes ...

    Mai 68 (en serais-je un "ancien combattant"), puis les Hippies, puis, et puis ... et puis la vie professionnelle, et puis la retraite, et puis "place aux jeunes".

    Un vieux râleur ? je préfèrerais "un jeune rêveur". Rêveur n'est pas encore une insulte.

    Merci, Almanito, pour ce bon coup de main technique pour publier cette musique, "Imagine, en français" :

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  • Exercice de style : Ravi, émerveillé.

     

    Oh, regarde, mon garçon, regarde ! Non, pas à la boulangerie, pas les croissants, non. Regarde cette petite dame, toute mignonne, toute souriante. Regarde donc ces jolies moufles aux couleurs de Noël, ces teintes bariolées qui se marient avec son teint si frais ainsi, si enjoué ! C'est si croquant, j'en suis émue à pleurer, bouleversée.

    Mais regarde donc, petit, regarde : on dirait la femme (ou la maman ?) du Père Noël ! Mais elle ne va pas s'arrêter pour la photo, non. Elle, c'est une vraie. Et puis, elle connaît les belles manières : Elle a attaché son chien, bien plus grand qu'elle, ma foi, à un poteau sur le trottoir, avant de pénétrer dans la boulangerie (un lévrier afghan ?) … Elle connaît bien toutes les règles de la bonne société.

    Comment ça, et moi ? Bien sûr, je respecte aussi les bonnes manières. D'ailleurs je vais aussi acheter quelque chose, en n'oubliant pas de faire, avant de sortir, des petits bisous charmants et charmeurs à la petite vendeuse.

    Quel bonheur !

    Oui, mais … Attention au chien !

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  • Exercice de style : Hésitations.

    Une dame, étrangement drapée dans un grand manteau blanc (ou rouge ? je ne sais plus), tournait et se retournait dans tous les sens, pensant qu'il était temps qu'elle arrête de faire la poule saoûle et qu'elle se décide (ou non) : des pains au chocolat, demain matin, au tidej ? Ou pas ?. Elle se dirigea d'abord, en trois ou quinze pas précipités, ou lents, - c'est selon, et tout à fait subjectif, on est sportif ou pas - vers une devanture de boulangerie, sur laquelle son chien (mais n'était-ce pas plutôt un chat?)  laissa un souvenir liquide et jaune.
    Mais elle n'y entra pas : son chien ne voulait pas, et tirait tellement qu'elle finit par le suivre, jusqu'au commissariat de police. Ou un hôpital, je ne sais plus. En tout cas il y avait beaucoup de gens masqués, avec des gants, et ça criait de tous côtés. Donc, impossible de savoir. Ah si, elle a vu « Urgences ». Mais non, pas plus avancée…
    La tête commençait à lui tourner. Une brouette - ou un lit à roulettes ? -  la dépassa en trombe, et elle reprit connaissance dans le bloc opératoire, à l'ambiance très joyeuse aujourd'hui, grâce aux airs de biniou et les danses bretonnes et les chants entonnés par… Étaient-ce des policiers, ou des infirmières, ou des médecins, ou des malades qui n'en pouvaient plus d'attendre, ou des malades déjà soignés mais ne trouvant pas la sortie…?
    Elle pensa : « Mais au fait … où est donc passé mon chien, dans l'histoire ? Il faut absolument que je le retrouve… Oh, et puis non ! »

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  • Un « exercice de style », un vrai de vrai, de Raymond Queneau dans son intégralité (99 textes, avec 99 thèmes) :

    http://www.oasisfle.com/ebook_oasisfle/exercices%20de%20style%-%20queneau_raymond.pdf

    Bonne lecture ! 

    J'ai commis ceci :

    "Enjoleuse"

    (Sur un quai de gare, une jeune femme rencontre

    un homme qui lui jette un regard,

    puis elle entre dans la boulangerie ...)

    Sur un quai de gare

    Gare, gare, gare au train

    Prends garde à toi

    Une jeune femme

    J’te l’avais bien dit

    Toutes sont des pièges

    Gare aux appâts

    Elle rencontre un homme

    Elle l’a cherché

    Il l’a cherchée

    C’est le destin

    Ils le voulaient bien

    Elle lui jette un regard

    Enflammé le fond des yeux

    Piégé le p’tit chéri

    Elle entre dans la boulangerie

    Et commande une couronne

    C’est ce soir qu’elle se marie

    train_004

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  • Les exercices de style, de Raymond Queneau

     

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Exercices_de_style

    ou l'art et le jeu d'écrire 99 textes, de 99 façons différentes,

    avec pour point de départ la phrase suivante :

     

    « Une dame entre dans une boulangerie avec un chien. »

     

    Descriptif.

    Une belle dame, coquette, de la grande ville du bord de mer, pénètre avec précaution, puis en éclatant de rire, dans une boulangerie toute blanche, toute petite, et presque invisible, au fond de la rue. Il s'en exhale un délicieux parfum de pains au chocolat. Elle tire tout à coup, furieusement, sur la jolie laisse rouge de son chien saucissonné, qui freine des pattes avant, car il n'aime pas ça, le chocolat. Et puis c'est très mauvais pour les chiens, voyons.

     

    Précis.

    La jolie – quoique défraîchie – vendeuse des Dames de France, à Paris XVème – mais si, vous savez bien, en haut à droite de la station de métro Général Boulanger – s'arrange avec soin et méticulosité avant d'entrer dans une échoppe ravissante, à la devanture qui scintille de dorures, de décorations vertes et rouges de Noël.

    Avant d'ouvrir la porte trop lourde (8 kg, c'est bien trop lourd pour elle, son mètre cinquante huit, et ses quarante sept kg …) trop lourde, disais-je, de cette boulangerie, elle jette un regard curieux sur le mur d'en face : Près de la station des Vélibs entassés en vrac sur le trottoir s'étale fièrement, en grandes lettres blanc sale qui dégoulinent, l'injonction : «  Défense d'afficher, loi du 14 juillet 1881 ».

    Elle sursaute : « C'est la date de naissance de ma grand-mère ! » Il faut dire que c'est Léone, sa grand-mère paternelle, elle n'a pas connu l'autre, dont le mari est mort à Verdun. 

    Elle se tient droite dans la boutique ; le choix va s'avérer difficile, entre tous ces merveilleux gâteaux multicolores, éclairs, choux, Paris-Brest … Vous ne voulez pas que je vous raconte l'histoire du gâteau Paris-Brest ?

    Son chien est resté dehors, attaché à un réverbère noir verni, pas encore allumé car la ville fait des économies depuis 26 jours et demi. Il n'a pas le droit d'entrer ; son air renfrogné et ses babines qui vibrent en sont la preuve.

    Elle ajuste tranquillement ses bésicles à monture or, relève la tête et sa chevelure bouclée comme celle d'une petite fille, et commande à voix basse deux pains au chocolat à la petite jeune fille dont je vous parlerai car il est déjà 17h42min34s et elle vaut le coup qu'on s'y attarde, ne serait-ce que 18 minutes et douze secondes.

     

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  • "Décrire un objet sans le nommer", une consigne d'atelier.

     

    Que serais-je sans toi, compagnon si fidèle ! Tu es comme l’eau, dont on ne réalise l’importance que lorsqu’elle est absente. Tu m’éveilles chaque jour, m’ouvrant les yeux à la vie, aux petites broutilles comme aux grands drames.

     

    Tu es vivant, né du noble bois qui est ton essence. Vivant de la voix des personnages qui t’animent, des icônes où je retrouve mon entourage familier. Tu es éphémère et permanent tout à la fois.

     

    Ton esprit, ta ligne de pensée sont omniprésents et reconnus. Les auteurs et les responsables de ton existence sont présents sur la place publique, appréciés, et l’intérêt de ton existence réside dans les affrontements que suscitent leurs actions.

     

    Tu es furtif, et vite rejeté, obsolète, et tu termineras ta vie dans une poubelle ou un barbecue. Tu es symbole de liberté, de tolérance, d’humanisme, et tu luttes, par ta seule présence, contre tous les autoritarismes et les autodafés.

     

    De l’horaire des marées à la critique littéraire en passant par les mots croisés, la vie associative et les débats politiques, tu es source de vie sociale, de créations d’emplois, de relations humaines.

     

    Cinq heures trente, tous les matins, même le dimanche : Le cyclomoteur ralentit, "le Télégramme" tombe dans ma boîte aux lettres. Le café peut fumer, la journée peut commencer !

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