• Nous prendrons le temps.

    Dans ma langue
    le temps passe,
    le temps est beau ou mauvais;
    le beau passe, le mauvais prend son temps.
    Nous prendrons le temps de vivre
    sous les soleils brûlants,
    sous les averses vivifiantes,
    d'être libres mon amour;
    libres de prendre nos temps
    et de prendre le temps qui est
    comme il hait ceux qui
    sans projet et sans certitude
    vont tels la cruche à l'eau
    et à la fin se brisent;
    nous pourrons rêver notre vie
    rêver du temps des fleurs
    des fleurs au fusil
    fusil du Temps
    qui nous achève.

    Loïc, sur l'atelier Miletune
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  • Le cri.

    On lui avait pourtant dit, pourtant, au Fernand, de ne pas sortir… Mais son fils avait tant envie de cette formation à l'école maritime. Il avait rêvé du noble métier de marin-pêcheur, il adorait tout ce qui touche de près ou de loin à la mer.
    Le ciel était mauvais, pourtant, on le lui avait dit, à Fernand. Mais Joël avait déjà fait son sac, préparé sa plus belle tenue du dimanche, celle qu'il ne porterait plus par la suite que pour les obsèques dans la famille, la petite, ou la grande, des marins du petit port.
    Le ciel était mauvais, très mauvais. Mais il se devait, s'était promis, d'aider Joël à bien démarrer dans la vie, à ne pas être gêné devant ses camarades, à tenir son rang. Il aurait tout le temps de rembourser, après quelques bonnes sorties en mer.
    Les femmes et les hommes, "réunis séparément", selon la coutume, devisaient tête penchée ; leurs mots étaient rares et pesants.

    Joël avait appris, par les attroupements dans les rues. Il était resté de marbre, blanc comme un linge, comme les robes de sa mère et des autres femmes. Immobile, il avait écarté les bras, levés vers le ciel, l'air hagard.
    Et le cri. Un hurlement bestial, nourri d'épouvante et de douleur mortifère, avait jailli de sa gorge, du plus profond de son être, interminable, secoué de râles étouffés. Puis s'éleva une longue plainte, qui quémandait, qui suppliait. Il criait à l'aide, au secours, appelait d'une voix misérable au soutien de la communauté et à la solidarité maritime.
    Le jeune homme était resté un long moment à genoux, le front contre le sol, totalement immobile, puis s'était levé, très lentement. Il semblait vouloir donner à son mouvement la mise en scène la plus noble et la plus sincère possible.
    Il lui devait bien ça, au père.

    Loïc, sur un sujet de l'atelier Miletune.

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  • Au musée de Pont-Aven, une exposition : "paysages de la Bretagne".
    'Débit à Doëlan', de Pierre Bompart.
    'Joël à la lecture', de Albert Clouard.

    Les deux fenêtres.

    "Toujours seul, le Mathieu… Et toujours à travailler. Il va y perdre la santé. Et surtout la tête, qu'il va perdre, moi je te le dis.
    Moi, là, tu vois, je pense, de mon côté, à mon fils Joël. Encore et toujours. Mathilde était trop jeune pour mourir ..."
    Les yeux du marin, perdus dans le vague, s'embrument de larmes. Jean, tout prêt de lui, est un taiseux. Ici on laisse la douleur parler. Les bars de marins sont des lieux où l'on s'extériorise publiquement mais sans bruit. On pousse une gueulante, parfois, et les copains comprennent.

    Joël a trouvé un refuge et une évasion dans la lecture. Il a dû arrêter l'école car il va devenir soutien de famille. Il devra s'y résoudre, ça lui est tombé dessus comme une vague traîtresse. Son regard court du livre à la fenêtre. Il a presque fini le volume, il pourra bientôt en changer à la bibliothèque paroissiale, où il apprécie de pouvoir se blottir dans les paroles bienveillantes de Monsieur l'Abbé.
    A chacun sa solitude, mais la mer est là, nourricière, tendre et compréhensive.
    Elle est leur bouée, leur lien indéfectible et vital, leur communauté. Jean interpelle Mathieu : « Bon. Une dernière chopine, et on y va ».
    Loïc
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  • Laideur ?

    " Comment ça, "un exemplaire hurlant, tonitruant, de laideur ? Une verrue dans le paysage" ... ? Non mais vous vous êtes regardés, les moussaillons ? Vous vous croyez beaux, peut-être, vous ? Expliquez-moi, alors, ce qui est beau, et ce qui est moche… Je me suis déjà assez accroché sur ce sujet avec les copains, en cours de philo et en séances d'Arts plastiques ! C'était… il y a très longtemps, dans une autre vie…"
    Les jeunes restent cois. L'Amiral ne plaisante pas, là. C'est évident : son regard brille, ses lèvres tremblent. Ce n'est pas le moment de le chatouiller; Le petit homme, nerveux, trépigne en passant d'un pied sur l'autre, comme un matelot en mer.
    "Au cours de mes voyages sur les vaisseaux de la Royale, puis sur mon bateau quand je vais traquer le bar de ligne, j'ai repéré tous ces déchets, ces bois flottés, qui me passaient sous le nez. Repéré aussi les criques, plage, anses où je les retrouverais.
    Oubliés alors les ordres, les contraintes militaires, vive la vie ! Remisé le Bachi, le treillis, les tenues d'été et d'hiver : Je ne serai plus que l'Amiral, seul maître à bord et le seul à qui obéir !
    Je me suis fait le serment de me bâtir, seul, ma maison, selon mes plans, mes envies, et tout le bazar : Merde à Vauban, nom d'une pipe en bois ! et voilà le travail ! Pouvez applaudir, oui !
    L'intérieur, croyez-moi si vous voulez, mais pas du tout de guingois ! Seulement quelques angles pas tout à fait droits, d'accord, mais… Les charpentiers-ébénistes de la Marine disent que sur un bateau on ne connaît pas l'angle droit.
    Ne vous inquiétez pas : pas folle la guêpe, je n'ai pas pété un câble. Cette façade n'est… qu'une façade. Un pied de nez à tous les conformistes, les diffuseurs de prêt-à-penser, les enfonceurs de portes ouvertes.
    Derrière le « laid », grattez donc un peu, prenez de l'assurance, et osez :
    Entrez, bienvenue chez l'Amiral, moussaillons, ici tout est « normal », vivable et décoré de mes laisses de mer, et de mes trouvailles, mes trésors. Même la table et le bar sont d'aplomb; allez, entrez ! "

    Loïc, avec mes remerciements aux Croqueurs de mots.


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  • Par la fenêtre, je vois le brouillard, familier, habituel, un compagnon de voyages, de rêvasseries en échappées, d'espoirs en illusions.
    En bas, des jeunes femmes poussent les landaus ou les poussettes, sur une belle allée plantée d'arbres alignés, plantés après la guerre pour tenter d'apporter un peu de vie et d'espoir en l'avenir à la ville meurtrie. Au loin, là-bas, la terre pénètre l'Atlantique. Depuis que papa a pu offrir à notre famille une 203 « commerciale », nous nous rendons parfois sur cette presqu'île, notre lieu d'évasion. Quelques kilomètres par la mer, mais cent par la route !
    Une terre encore épargnée de tous les tracas de la ville "béton-bitume", fracassée, que les habitants ont réinvestie, se frottant les yeux pour effacer à jamais les démons et les traumatismes.
    Sur notre presqu'île aussi naissent des enfants, des baby-boomers, et ils courent à travers les champs, en chantant, et même en sifflant : Je suis si fier d'avoir appris !
    Ici, autour du calvaire, nous nous ressourçons autour d'un vrai paysage de Bretagne. Les femmes en noir qui sortent de l'église puis s'assoient pour commérer sur les bancs de pierre ont toujours été là, n'ont pas interrompu leurs conversations, jamais, semble-t-il. Tout est couleurs, calme, sérénité. Devant le collège privé, les "Frères à quatre bras" accueillent les adolescents en culotte courte qui accourent comme des piafs.
    Les jeunes du bagad Bleuniou Sivi ("fleurs de fraises") accordent consciencieusement leurs cornemuses : fini le calme, mais bientôt le concert !
    Mais ... Mon regard s'était perdu dans le vide.
    Une image apparaît, furtive, incongrue, très dérangeante, menaçante. Un fantôme ? un mirage ? Un cauchemar ?
    Fermée, la fenêtre; tirés, les rideaux.

    Ce sous-marin est venu tout gâcher.
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  • <header class="entry-header" style="background-color: white; transition: 0.3s linear;"></header>
    Garçon, ou fille ? Ne nous y trompons pas : le legging bariolé n’est pas forcément ici un symbole de féminité. Mais approchons-nous un peu : les ongles sont vernis. Effarouchée, elle arbore une fierté aux multiples causes, sans doute. Une mine abattue au premier abord, devant la misère endémique de son pays, devant la calamité des catastrophes qui le mettent à bas, régulièrement. Incompréhension, aussi, du marasme économique et de l’instabilité politique 
    Fière de participer très activement aux sursauts incessants face aux destructions, aux maladies. Elle aide autant qu’elle le peut le travail des associations étrangères qui s’attachent à répartir équitablement les dons qui leur parviennent.
    Fière de son papa : La famille possède une moto. Un trésor. Cet outil de liberté et la joie de vivre, aux couleurs vives et criardes de l’optimisme et de l’espoir.
    Ils se sont arrêtés. Le père a mis pied à terre, et tous trois fixent l’objectif du photographe. Dans leur regard, de la fierté encore, surtout dans les yeux de la maman. Mais la petite fille semble dire : « Arrêtez, Monsieur, maman ne veut pas, elle n’aime pas les photos, elle ne veut pas qu’on lui prenne un morceau de sa vie… » Et elle secoue la tête de droite à gauche, faisant virevolter ses dreadlocks, dont la mise en place est le plaisir de sa maman, tous les matins.
    Où vont-ils donc ? À l’école ? Non, la petite y va toute seule, du moins quand les locaux sont opérationnels. Chez le médecin ? Non. Elle tousse, depuis quelques jours, mais trop de malades se morfondent déjà dans les salles d’attente : il y a d’autres priorités.
    Alors elle avance de nouveau, dans la pétarade de l’engin qui fend la foule dans une débauche de couleurs.
    Entre papa et maman, elle est bien.
    Loïc
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  • Le sujet de Miletune, ICI 

    Productivité ...

    Arrête, coco. J'en suis à mon deuxième paquet de cigarettes, et au vingtième café… Je me gave de chocolat depuis ce matin, mais rien à faire, rien ne vient…
    Pourtant pas la mer à boire ! Tu as fait bien plus, rappelle-toi ta saga des Rouillard-Makon…
    Un polar… Il veut vendre, le boss : vendre, vendre… Des polars.
    Ne néglige pas le polar, tu ne le connais pas ! Tu n'en as jamais écrit.
    Ni lu ! De la littérature de hall de gare !
    Tu vois bien que tu ne les connais pas ! Alors, avant de les défoncer, apprends à les apprécier : dans ce genre-là aussi il y a le meilleur comme le pire.
    - Oh, tu sais, Coco, j'en ai vraiment assez, je n'arrive pas à suivre, c'est nul de chez nul.
    L'écrivain, tout à coup, se recule, ouvre son tiroir, balaie son bureau et même son ordinateur qui éclate en étant projeté à terre.
    Il s'est retourné et sans viser a tiré à bout portant sur coco.
    Celui-ci expire en murmurant :

    Tu vois bien ... que tu le tiens ..., le début de ... ton polar… Rhâââ ... »
    Loïc

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  • Ma chérie

    Ne me quitte pas,
    Mon sexe à piles;
    Je te les changerai,
    Promis;
    Je caresserai tes flancs
    De droite et de gauche;
    Puis mes doigts te chercheront
    Trouveront ton point G,
    Clic !
    Plus de fil à la patte,
    Liberté sans entrave
    à nos ébats, ma chérie,
    Mon amour,
    Ma souris.

    Sur un sujet des Croqueurs de mots.

      (pas d'illustration aujourd'hui, cela pourrait déflorer !)
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  • <header class="entry-header" style="background-color: white; color: #444444; font-family: 'Open Sans', 'Helvetica Neue', Helvetica, Arial, sans-serif; line-height: 30px; transition: opacity 0.3s linear;">

    Des verbes du 1er groupe au passé simple, des mots contenant le son CHA, on mixe, et le tour est joué … :

    </header>
              Devant sa datcha, elle ébaucha un chachacha. Le chamane à l’écharpe chatoyante n’échappa pas au préchi-précha chafouin; chacun s’y accrocha car chaque chaland chercha à chasser son chagrin.
              Elle s’écharpa avec ce pacha qui la chatouilla, puis se cacha dans un cachot. Elle lui faucha son sac de couchage, se percha sur son échafaudage, et cracha dans ses mains.
              Le chameau, chahuteur, cravacha son chameau, qui se nicha dans la datcha. Ce chacal chercha la charrue au château, et s’acharna sur des charpies … Elle chavira, rêvant de cachalots …
              Mais elle tricha, s’approcha de cet échalas de pacha, et déboucha un Château-Chabadabada.
    Loïc

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  • ONDE

    Dans le courant
    d'une onde pure
    à cheval
    la belle remontait
    vers l'aval
    Pure elle ne l'était plus
    depuis longtemps
    pas plus que l'eau
    sur ses cheveux blonds
    l'eau pure
    du courant
    pas si sûr
    mon enfant
    Méfie-toi des blondes
    qui jouent du pipeau
    L'eau de l'aval
    l'eau de l'amont
    tout est pipé
    jeux de dupe
    sous les jupes
    jeux de dés
    Tu es ruiné
    Méfie-toi des blondes
    qui jouent du pipeau
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